Mémoire, Alzheimer : le sucre abîme le cerveau

Par Juliette Pouyat - Journaliste scientifique Publié le 06/06/2017 Mis à jour le 02/02/2018
Article

Les personnes qui consomment plus de sodas, de jus de fruits et de glucides raffinés ont un cerveau moins volumineux, moins performant et plus à risque de déclin cognitif.

Les études

Une étude montre que la consommation de boissons sucrées est associée au vieillissement du cerveau et à l’apparition de signes précoces de la maladie d’Alzheimer. Les chercheurs ont utilisé les données concernant plus de 4 000 personnes âgées de plus de 30 ans. Les résultats montrent que plus la consommation de boissons sucrées est élevée moins le volume du cerveau et les scores au test de mémoire sont importants. Or, ces facteurs peuvent représenter des signes précoces de la maladie d’Alzheimer. Par rapport à ceux qui ne buvaient pas de boissons sucrées, ceux qui en buvaient 1 à 2 par jour présentaient une réduction du volume cérébral équivalent à 1,6 années de vieillissement normal et des scores inférieurs au test de mémoire, équivalents à 5,8 années de vieillissement normal. Et le fait de boire plus de 2 boissons sucrées par jour aggravait encore plus ces résultats.

D’autres données montrent que les personnes qui ont une alimentation à index glycémique élevé ont plus de plaques amyloïdes dans le cerveau, une caractéristique des malades Alzheimer.

Une autre étude parue dans la revue Diabetologia début 2018 apporte des éléments supplémentaires.5189 personnes y ont été suivies pendant 10 ans pour analyser la relation entre une glycémie élevée et/ou un diabète et le déclin cognitif à long terme. Les chercheurs montrent qu’une glycémie élevée – que l’on soit en présence d’un diabète ou non, s'accompagne d'une accélération du déclin cognitif par rapport à un niveau de sucre sanguin normal. Le déclin cognitif peut survenir longtemps avant le début de la démence. Les prochaines études devront dire si, en revenant à une glycémie optimale, le déclin cognitif est enrayé.

Lire aussi : le sucre torpille la mémoire

Comment expliquer les résultats des chercheurs ?

Une consommation excessive de sucre et de glucides rapidement digérés (index glycémique élevé) peut conduire à un diabète de type 2, qui expose à un risque plus élevé de démence. Mais sans être diabétique, l’excès de sucre « se voit » aussi au niveau de notre cerveau et pourrait diminuer mémoire et capacités cognitives voire conduire à une démence. 

Tout comme le diabète, la maladie d’Alzheimer est liée au métabolisme du glucose. En effet, le glucose provenant de l’alimentation est moins bien utilisé par les zones cérébrales touchées par Alzheimer. Dans ce contexte, privés de leur source d'énergie, les neurones finissent par mourir. Selon une étude, une détérioration du métabolisme du glucose dans le cerveau peut même être détectée avant le déclin cognitif. La maladie d’Alzheimer est associée à des troubles métaboliques et une résistance à l’insuline. D’ailleurs, les diabétiques ont un risque 2 à 5 fois plus élevé que les personnes en bonne santé de développer ucette maladie.

En pratique

  • Les études conduites jusqu’ici laissent penser qu'en contrôlant sa glycémie on peut ralentir ou éviter le déclin cognitif qui précède démence et maladie d’Alzheimer. Concrètement, en prévention, il s’agit de diminuer les aliments ultra-transformés, les aliments raffinés (pain blanc, etc.) et les aliments sucrés (sodas, café sucré, jus de fruits) et choisir ses glucides en fonction de leur index glycémique.
  • Le régime méditerranéen qui privilégie fruits, légumes, poisson et huile d’olive représente une bonne option en prévention.
  • En cas de troubles cognitifs légers, un régime pauvre en glucides (low-carb, style Atkins) pourrait être essayé.
  • Chez les personnes déjà atteintes de troubles cognitifs, de démence ou de la maladie d’Alzheimer, il y a des arguments pour instaurer un régime cétogène très pauvre en glucides et riche en graisses. Lorsque le glucose n'est plus correctement utilisé par les cellules nerveuses comme source d'énergie, il est en effet possible de « nourrir » les neurones avec des corps cétoniques issus des graisses. Ils représentent une excellente alternative et ont donné des résultats prometteurs. Pour cela, on peut donc mettre en place un régime cétogène (avec le concours d'un diététicen-nutritionniste) ou enrichir le régime habituel de triglycérides à chaîne moyenne (TCM, des graisses transformées en corps cétoniques par le foie). Dans l’étude BENEFIC, où des volontaires avec troubles cognitifs légers ont reçu un supplément de 30 g de TCM, les résultats préliminaires montrent que les capacités cognitives étaient meilleures chez les patients dont le niveau de cétones était le plus élevé. Les résultats complets sont attendus dans le courant de l'année 2018.

Pour aller plus loin : Le régime cétogène contre la maladie d'Alzheimer, par le Dr Michèle Serrand

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