Diabète de type-2 : un régime pauvre en glucides (low carb) améliorerait la fonction rénale

Par Thierry Souccar - Journaliste et auteur scientifique, directeur de laNutrition.fr Publié le 14/12/2021 Mis à jour le 14/12/2021
Choisir ses aliments

Les personnes atteintes de diabète de type 2 qui suivent un régime pauvre en glucides ou low carb peuvent « améliorer considérablement » leur fonction rénale selon une étude britannique. Et près de la moitié des participants ont pu arrêter leur traitement du diabète.

L’étude remet en question l’idée qu’une alimentation low carb, pourtant plus riche en protéines, nuit à la santé des reins, en particulier chez les personnes d’âge mûr souffrant de diabète de type-2.  

Le diabète de type-2

3,5 millions de Français sont diabétiques, dont plus de 90 % souffrent de diabète de type 2. Le diabète de type-2 apparaît généralement après 50 ou 60 ans. Il se manifeste par une glycémie à jeun (sucre sanguin) durablement élevée, c’est-à-dire égale ou supérieure à 1,26 g/l (7 mmol/L). On mesure aussi dans le sang le niveau d’hémoglobine glyquée ou HbA1c, qui indique le taux moyen de sucre dans le sang au cours des 2 à 3 derniers mois, et qui doit être inférieur à 6,5%. 

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Le diabète a pour origine une résistance à l’insuline, au cours de laquelle les cellules ne captent plus le sucre sanguin en dépit de la présence d’insuline sécrétée par le pancréas. Cette résistance à l’insuline peut se développer de manière insidieuse pendant plusieurs décennies.

Lorsque résistance à l’insuline et diabète se poursuivent pendant plusieurs années, le pancréas peut finir par s’épuiser et ne plus synthétiser d’insuline. Le diabète non traité expose à des complications graves : maladies cardiovasculaires, perte de la vision, risque d’amputation, insuffisance rénale, démence. L’insuffisance rénale concerne 1 diabétique sur 3. Selon une étude britannique récente, les taux de mortalité des personnes atteintes de néphropathie du diabète sont élevés, passant de 1,4 % par an (normoalbuminurie) à 4,6 % par an (protéinurie de grade clinique) et à 19,2 % par an pour les personnes atteintes d'insuffisance rénale.

La fonction rénale est mesurée par plusieurs paramètres comme le niveau d’urée dans le sang ou le taux sanguin de créatinine qui permet d’estimer le taux de filtration glomérulaire. Le diagnostic d’insuffisance rénale est posé dans le diabète lorsque le taux de filtration glomérulaire estimé est inférieur à 60 ml/min/1,73 m 2 de surface corporelle, et/ou une microalbuminurie supérieure à 3 mg/g, ou un rapport albumine/créatinine supérieur ou égal à 3 mg/mmol.

La diététique du diabète de type-2

Pour prendre en charge les diabétiques, les autorités sanitaires conseillent au corps médical et aux diététiciens-nutritionnistes de leur proposer, en plus des traitements comme la metformine, des mesures diététiques et d’exercice physique. « Depuis plusieurs décennies, écrit Jérémy Anso, dans Santé mensonges et encore propagande, ces conseils diététiques reposent sur une diminution des graisses, sans restriction particulière des glucides qui devraient représenter 50 à 55 % des calories ». Pour la Haute autorité de santé (HAS), en effet « les aliments glucidiques ont une place indispensable pour leur effet sur le rassasiement et la prise alimentaire. [Il faut] conseiller le pain et les féculents. »

Or, les glucides sont précisément les nutriments qui élèvent le plus la glycémie et sollicitent le plus le pancréas. Partant de ce constat, les régimes low carb (de l’anglais low carbohydrate), au contraire des conseils classiques, préconisent de réduire la consommation d'aliments sources de glucides (donc de glucose) pour améliorer la glycémie. Doivent notamment être diminués : aliments sucrés, féculents comme le pain, les pommes de terre et le riz. Ces aliments se voient remplacés par des légumes, des noix, des fruits peu glycémiants comme les baies, des produits laitiers entiers, des œufs, de la viande. Le régime low-carb est donc à la fois moins glucidique, plus protéiné et plus gras que les régimes traditionnels. Ce type d’alimentation est aujourd’hui reconnu comme efficace et sûr dans le diabète par plusieurs organismes officiels et sociétés savantes, dont l’American Diabetes Association. C’est avec le régime hypocalorique de l’université de Newcastle, la manipulation diététique la plus documentée contre le diabète.

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Ce que les chercheurs ont trouvé

Les cliniciens ont suivi 143 adultes (âge moyen : 61 ans) atteints de diabète de type 2, qui ont opté pour un régime pauvre en glucides pendant plus de deux ans. 

Résultats : les chercheurs ont découvert qu'au lieu de la détérioration attendue de la fonction rénale (en raison à la fois de l'âge et du diabète), la majorité des participants ont vu leur fonction rénale s’améliorer après avoir suivi cette alimentation pauvre en glucides. En 30 mois, la créatinine sérique des participants s'est améliorée de 4,7 µmol/L, en moyenne. Sur 132 patients, 88, soit 67% ont vu leur créatinine sérique s’améliorer.

La perte de poids moyenne était de 9,5 kg et les niveaux de HBa1C ont notablement baissé de 21,5 mmol/mol en moyenne. La pression artérielle, les taux de cholestérol et de triglycérides se sont également améliorés de manière significative. Dans l'ensemble, 97% des participants ont amélioré leur contrôle du diabète. Près de la moitié des participants, soit 47%, a connu une rémission du diabète sans médicament. Six patients ont pu arrêter complètement l'insuline et pour 9 autres, la dose d'insuline a été considérablement réduite

Le Dr David Unwin appartient au Norwood Surgery, un cabinet de médecins généralistes au nord de de Liverpool. Il propose aux patients diabétiques un régime pauvre en glucides depuis 2013. En 2016, il a reçu des services de santé britanniques (NHS) le prix de « l’innovateur de l’année » pour avoir fait économiser aux finances publiques plusieurs dizaines de milliers de livres en médicaments et traitements, grâce à son approche diététique. Son cabinet prescrit 58 362 euros de médicaments en moins que la moyenne de la région.

L’amélioration de la fonction rénale a pu être due à la perte de poids moyenne observée dans cette étude, mais l’étude n’a pas trouvé de lien significatif entre la perte de poids et l'amélioration de la créatinine. Une autre explication pourrait être l'effet de l'amélioration de la pression artérielle. L'hypertension est un facteur important dans le développement des maladies rénales du diabète. L’amélioration de 11,7 mmHg (mm de mercure) de la pression artérielle systolique dans cette étude pourrait expliquer les bénéfices sur la fonction rénale.

En pratique

Cette étude de cohorte vient soutenir l’intérêt d’un régime pauvre en glucides dans le diabète, même s’il ne s’agit pas d’un essai clinique randomisé. Elle suggère qu’un tel régime alimentaire peut améliorer nettement plusieurs paramètres physiologiques comme le poids, la glycémie, la pression artérielle, la fonction rénale, et réduire considérablement le recours aux médicaments en conduisant une partie des patients à la rémission du diabète. Il faut cependant souligner que la fonction rénale des participants n’étant pas fortement dégradée à l’origine, on ne sait pas si ces effets seront observés chez des patients plus atteints.

L’étude montre aussi qu’un apport de protéines plus élevé n’a pas nui aux reins. D’ailleurs, un essai clinique randomisé d’un an, qui utilisait un régime de composition similaire à celui-ci, (14 % des calories sous forme de glucides soit moins de 50 g/jour, 28 % de protéines, 58 % de matières grasses), a conclu que « par rapport à un régime traditionnel amaigrissant riche en glucides, la consommation d'un régime pauvre en glucides et riche en protéines n'affecte pas négativement les marqueurs cliniques de la fonction rénale chez les adultes obèses atteints de diabète de type 2. »

Voici une sélection de livre pour aller plus loin : 

Références
  1. Unwin, Davida; Unwin, Jena; Crocombe, Dominicb; Delon, Christinec; Guess, Nicolad; Wong, Christophere Renal function in patients following a low carbohydrate diet for type 2 diabetes: a review of the literature and analysis of routine clinical data from a primary care service over 7 years, Current Opinion in Endocrinology & Diabetes and Obesity: October 2021 - Volume 28 - Issue 5 - p 469-479 doi: 10.1097/MED.0000000000000658

    • Tay J, Thompson CH, Luscombe-Marsh ND, Noakes M, Buckley JD, Wittert GA, Brinkworth GD. Long-Term Effects of a Very Low Carbohydrate Compared With a High Carbohydrate Diet on Renal Function in Individuals With Type 2 Diabetes: A Randomized Trial. Medicine (Baltimore). 2015 Nov;94(47):e2181. doi: 10.1097/MD.0000000000002181. PMID: 26632754; PMCID: PMC5059023.

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