Pourquoi le Nutri-Score ne vous aidera pas à rester en bonne santé

Par Dr Pascal Goncalves - alias Dr Food, Médecin généraliste Publié le 14/04/2023 Mis à jour le 14/04/2023
Point de vue

L'UFC-Que Choisir demande l'obligation de l'étiquetage Nutri-Score, car il valorise des aliments contenant moins de sucre, moins de gras, moins de sel. Pourtant les aliments ultra-transformés resteront toujours associés à plus de diabète, plus d’obésité, plus de cancer.

Tous les aliments transformés et emballés doivent présenter un tableau nutritionnel indiquant les calories, les teneurs en protéines, glucides, matières grasses, sel, etc. Ces informations sont souvent difficiles à interpréter pour un public non averti. C’est pourquoi le gouvernement français a recommandé d’utiliser un système d’étiquetage plus simple : le Nutri-Score. Avec un score de A à E, cet outil a pour objectif de simplifier la compréhension de ce tableau nutritionnel. Les aliments affichant un Nutri-Score A correspondraient à des aliments de meilleure qualité nutritionnelle, tandis que ceux dotés d’un E seraient de moindre qualité.

Le Nutri-Score part donc d’une bonne intention, malheureusement, il ne vous aidera pas à rester en bonne santé. ‪Comme il est bien souligné dans le dossier Obésité et surpoids : près d’un Français sur deux concerné publié par l’inserm le 20 février 2023 : « depuis la mise en œuvre du Programme national nutrition santé (PNNS) en 2001, l’obésité en France ne fait que s’accroître, année après année », et ajoutons que les maladies cardiovasculaires et le diabète de type 2 progressent aussi (1).

Le ‬logo Nutri-Score a été conçu dans le cadre du PNNS pour informer les consommateurs sur la qualité nutritionnelle d’un produit. Mais le constat est simple, les prévalences de maladies chroniques ne cessent de progresser malgré ces programmes de santé publique. Alors où est le problème ? ‬

L'importance de la structure physique des aliments

Ce qu’il faut bien comprendre, c’est qu’un aliment ce n’est pas seulement une somme de nutriments. Un aliment se définit d’une part, par sa composition nutritionnelle, c’est-à-dire les nutriments qui le constituent : les protéines, lipides, glucides, vitamines, minéraux, oligo-éléments... D’autre part, par sa structure physique, c’est-à-dire la manière dont ces nutriments sont liés les uns avec les autres au sein d’un aliment brut.

Composition nutritionnelle et structure physique sont indissociables pour déterminer l’impact d’un aliment sur l’organisme et la santé. Il est essentiel de comprendre que les effets sur la santé dépendent avant tout des liens d’origine qui unissent les nutriments entre eux dans l’aliment brut (la structure physique), davantage que des nutriments eux-mêmes (la composition nutritionnelle).

Le problème du Nutri-score est que pour juger de la qualité nutritionnelle d’un aliment, il se base uniquement sur la composition nutritionnelle, mais il ne tient pas compte de sa structure physique, et donc, de son degré de transformation. C’est une vision très réductrice du potentiel santé d’un aliment, car on sait aujourd’hui que les effets – et les méfaits – d’un aliment ne se réduisent pas uniquement à sa teneur en nutriments. Il faut aussi, et surtout, prendre en compte son degré de transformation.

Les risques liés à la consommation d'aliments ultra-transformés

Plus un aliment est ultra-transformé, c’est-à-dire plus sa structure physique est dégradée, plus il est néfaste pour la santé à long terme. Les maladies chroniques sont d'abord associées à la dégradation et à l'artificialisation des structures physiques des aliments plutôt qu'à la composition nutritionnelle des aliments, en d’autres termes : la qualité des calories compte plus que leur quantité (2).

Ainsi, comme il ne tient compte que de la composition nutritionnelle, le Nutri-Score en vient à valoriser des produits mauvais pour la santé s’ils sont consommés régulièrement, comme certaines boîtes de céréales ultra-transformés du petit déjeuner notées A ou des sodas light classé B. Il faut savoir qu’en 2019, SIGA a publié qu’en supermarché, plus de 50 % des produits Nutriscore A ou B étaient ultra-transformés (3).

Le Nutri-Score envoie le message aux consommateurs non avertis que ces aliments sont bons pour la santé. Cela nous induit en erreur, car c’est à la transformation des aliments qu’il faut faire attention en priorité. Quel que soit son Nutri-Score, un aliment pas ou peu transformé sera toujours meilleur pour la santé qu’un aliment ultra-transformé, même si celui-ci présente un Nutri-Score A. Un aliment ultra-transformé avec un Nutri-Score A reste un aliment ultra-transformé avant tout. Il ne faut pas se focaliser uniquement sur les nutriments, mais sur l’aliment dans sa globalité. Il est toujours utile de préciser que nous ne mangeons pas des nutriments, mais des aliments.

Alors oui le Nutri-score permettra de fabriquer des produits industriels moins gras, moins sucrés ou moins salés, comme s'en félicite l'association UFC-Que choisir en conclusion de l'étude qu'elle vient de publier le 12 avril 2023, mais il ne vous garantira pas d’être en meilleure santé notamment car il ne tient pas compte du degré de transformation des aliments. En 2021, une méta-analyse de plus de 40 études observationnelles a montré que la consommation d'aliments ultra-transformés était associée à un risque accru de surpoids, d’obésité, de maladies cardiovasculaires, de syndrome métabolique, de cancers, et de mortalité toutes causes confondues (4).

Mieux éduquer à l'alimentation

Pour le bien des consommateurs, l’UFC Que Choisir ne devrait pas appeler à rendre obligatoire l’affichage du Nutri-Score, mais plutôt s’efforcer de rendre obligatoire à l’école une éducation holistique à l’alimentation saine et durable, seul moyen de rendre autonome le consommateur (il n’y a plus besoin d’aucun score quand le consommateur comprend ce qu’il mange), de le sensibiliser à l’influence du marketing des industriels dans ses choix alimentaires et de lutter contre l’inégalité d’accès aux connaissances en alimentation.

Pour aller plus loin, lisez Mieux vaut prévenir, Dr Pascal Goncalves

Références
  1. Cara G. Obésité et surpoids : près d’un Français sur deux concerné. État des lieux, prévention et solutions thérapeutiques [Internet]. Salle de presse de l’Inserm. 2023 [cité 5 mars 2023].
  2. Fardet, A. and E. Rock (2022). Chronic diseases are first associated with the degradation and artificialization of food matrices rather than with food composition: calorie quality matters more than calorie quantity. European Journal of Nutrition 62: 2239-2253.
  3. SIGA. Complémentarité entre l’indice Siga et le Nutri-Score pour refléter le potentiel santé des aliments. [Internet]. 2019.
  4. Lane MM, Davis JA, Beattie S, Gómez-Donoso C, Loughman A, O’Neil A, et al. Ultraprocessed food and chronic noncommunicable diseases: A systematic review and meta-analysis of 43 observational studies. Obes Rev. mars 2021;22(3):e13146.

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