Dr Food : ses conseils pour éloigner le médecin

Par Marie-Céline Ray - Journaliste scientifique Publié le 06/02/2023 Mis à jour le 08/02/2023
Point de vue

Le Dr Pascal Goncalves, alias Dr Food, aime tellement ses patients qu'il ne veut pas les voir revenir dans son cabinet malades. Aussi, parallèlement aux traitements standards, il les aide à modifier leur mode de vie et leur alimentation pour qu'ils restent en bonne santé. Rencontre.

Médecin généraliste en Normandie, Pascal Goncalves préfère avoir des patients en bonne santé que des patients qui ont besoin de médicaments. Mais souvent il n'a pas suffisamment de temps en consultation pour leur expliquer l’importance du mode de vie pour la santé. Dans son livre Mieux vaut prévenir, il prodigue ses conseils pour amorcer des changements bénéfiques à long terme. Nous l'avons interrogé sur sa vision de la nutrition en France.

LaNutrition : D’après ce que vous constatez dans votre cabinet, pensez-vous que les Français ont de bonnes connaissances en nutrition ? Y a-t-il des domaines où vous jugez que la formation à l’école, au collège, est insuffisante pour donner aux adultes les clés pour être en bonne santé ?

Dr Food : Malheureusement non les Français n’ont pas de bonnes connaissances en alimentation, et pire : ils l’ignorent ! Mais comment leur en vouloir, je peux le constater chaque jour à mon cabinet, nous manquons en France d’une vraie politique d’éducation à la santé. Il manque à l’école une éducation à la santé en général et une éducation à l’alimentation en particulier.

J’ai la chance depuis quelques années de pouvoir proposer à des lycéens une formation à une alimentation saine et durable. Quel plaisir d’avoir de jeunes étudiants volontaires qui participent activement et sont sensibles à l’influence de leur choix alimentaire sur leur santé et la planète ! L’occasion aussi pour moi de les sensibiliser à l’influence du marketing des industries agro-alimentaires quand ils feront leurs courses. Alors que nous savons qu’une meilleure connaissance de la nutrition augmente les chances de manger plus sainement, il n’est pas encore prévu que l’éducation à l’alimentation devienne une discipline à part entière. Et pourtant, l’alimentation est une magnifique discipline transversale, quand on parle alimentation, on peut parler histoire, géographie, mathématiques, etc. L’éducation à l’alimentation est un enjeu fondamental avec des répercussions multiples, il est urgent de l’enseigner, et je serais heureux que mon livre devienne un manuel scolaire.

Que pensez-vous de l'étiquetage Nutri-Score ?

Tous les aliments transformés et emballés doivent présenter un tableau nutritionnel indiquant les calories, les teneurs en protéines, glucides, sel, etc. Ces informations sont souvent difficiles à interpréter pour un public non averti.  C'est pourquoi le Nutri-Score peut paraître intéressant car il permet, en un coup d’œil, grâce à une lettre et une couleur, de simplifier la compréhension de ce tableau nutritionnel. Le Nutri-Score part donc d'une bonne intention. Malheureusement, pour juger de la qualité nutritionnelle d’un aliment, le Nutri-Score se base uniquement sur la composition nutritionnelle en quelques nutriments mais il ne tient pas compte de son degré de transformation. C’est une vision réductrice du potentiel santé d’un aliment, car on sait aujourd’hui que les effets – et les méfaits – d’un aliment ne se réduisent pas uniquement à sa teneur en nutriments. Il faut aussi, et surtout, prendre en compte son degré de transformation.

Ainsi, le Nutri-Score peut valoriser des produits mauvais pour la santé s’ils sont consommés régulièrement, comme certaines céréales du petit-déjeuner ou des sodas light classés A ou B parce qu’ils ont une teneur raisonnable en sucre et en graisse, et, a contrario, en dévaloriser d’autres meilleurs pour la santé, comme un camembert artisanal noté D ou une huile d'olive notée C, en raison de leur richesse en gras. Cela peut induire le consommateur en erreur, car c’est à la transformation des aliments qu'il faut faire attention en priorité. Un aliment ultra-transformé avec un Nutri-Score A ou B reste un aliment ultra-transformé. Il ne sera jamais bon pour votre santé !

Peut-on manger des produits surgelés ? Lesquels et pourquoi ?

Oui… et non, tout est une question de choix ! Pour rappel, la surgélation est un processus industriel consistant à abaisser très rapidement la température d’un aliment afin de limiter la prolifération des bactéries et de garder intactes ses cellules. Il n’y a besoin d’aucun ajout d’additifs, seul le froid permet de conserver l’aliment. Faciles à conserver et à cuisiner, les produits surgelés présentent généralement de bonnes qualités nutritionnelles. Donc oui, les produits surgelés peuvent représenter une bonne alternative à la consommation de produits frais, mais encore faut-il savoir les choisir ! Par exemple, certaines poêlées de légumes surgelés présentées comme saines à grand renfort de marketing, sont en fait des produits ultra-transformés. Or, si vous achetez un produit ultra-transformé, surgelé ou non, il reste ultra-transformé ! Les produits surgelés peuvent être bons pour la santé, à condition que ce soit des produits surgelés bruts.

Quelles quantités de viandes et poissons conseillez-vous de manger par semaine, si on n’est pas végétarien ?

Pour avoir une alimentation saine et durable, il faut avoir une alimentation plus végétale. Mais cela ne signifie pas que vous devez supprimer totalement la viande et le poisson de vos menus, simplement d’en manger moins et de meilleure qualité. Concernant la viande, pour notre santé et celle de la planète, il est conseillé d’une part de diminuer la consommation de viande en général, et d’autre part de privilégier de la viande non transformée issue d’animaux élevés en plein air dans des conditions respectueuses du bien-être animal. En outre, quand on consomme de la viande, il est préférable de limiter la consommation de viande rouge (sans pour autant l’interdire), et de privilégier la volaille. Concernant le poisson, sa consommation présente des bénéfices pour la santé, mais également des risques, notamment de contamination et d’épuisement de nos ressources en poissons. Par précaution, il est conseillé de limiter votre consommation à deux portions de poisson par semaine en privilégiant les poissons issus d’une pêche durable et en respectant la saisonnalité. Le poisson aussi a des saisons.

En ce qui concerne les quantités à manger, je m’efforce autant que possible à ne jamais donner de poids mais des principes simples facilement reproductibles pour savoir quelle quantité manger. J’ai déjà eu l’occasion de voir une personne sortir une balance de son sac à main car elle suivait un régime pour perdre du poids ! Je conseille plutôt d’utiliser des petites assiettes, d’avoir toujours au moins autant (et idéalement plus) de légumes que de viande ou de poisson dans son assiette, de limiter sa portion à « une paume » de main, etc. Ainsi, si vous souhaitez manger de la viande, je vous conseille de limiter chaque portion à une paume de main, à raison de 4 paumes maximum par semaine, et de privilégier la volaille. Si vous souhaitez manger du poisson, je vous conseille de limiter chaque portion à une paume de main également, à raison de 2 paumes par semaine maximum, en alternant entre poissons maigres et poissons gras. Enfin, une fois par semaine, je conseille d’essayer de ne consommer ni viande ni poisson, c’est l’occasion de découvrir les légumineuses…

Retrouvez les chroniques de Dr Food sur des madeleines "diététiques", le pain d'épices ou le pain de mie

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