Comment l'alimentation aide à se protéger des infections virales

Par Sarah Amiri - Diététicienne et journaliste scientifique Publié le 27/04/2020 Mis à jour le 09/11/2021
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L'alimentation occupe un place primordiale dans la lutte contre les infections virales, mais les pouvoirs publics peinent à le reconnaître. Explications.

Le respect des mesures de distanciation sociale promues contre le COVID-19, est un très bon moyen de limiter le risque d’infection. Cependant, l'expérience montre que tout le monde n'adhère pas de la même façon à ces mesures, ce qui limite leur portée. Les vaccins diminuent les risques d'hospitalisation, de formes sévères et de décès mais ils n'empêchent pas la transmission et ne peuvent à eux seuls éradiquer la maladie. Les traitements sont encore émergents, peu nombreux, et constituent une dernière ligne de défense contre les complications, une fois qu'on a été contaminé.

Lire notre dossier complet: Les bons gestes face au coronavirus

Pour toutes ces raisons, explique le Pr Philip Calder de l'université de Southampton, « l'amélioration de notre alimentation est une mesure très simple que nous pouvons tous prendre pour aider notre corps à faire face aux infections et à limiter l'émergence de nouvelles souches de virus plus virulentes. » Ce professeur d'immunologie nutritionnelle fait partie des chercheurs dont les travaux plaident pour une optimisation des mesures de nutrition : « Nous encourageons vivement, dit-il, les responsables de la santé publique à s'assurer que des stratégies nutritionnelles sont incluses dans tous leurs messages sur la manière de faire face aux infections virales. » Un message jusqu'ici peu entendu !

Toutes les connaissances récentes sur la nutrition et l'immunité sont dans le livre de Thierry Souccar, Arrêtons de saboter notre immunité

L'alimentation, un pilier du système immunitaire

Pourtant, l'alimentation est essentielle au bon fonctionnement du système immunitaire. Les personnes manquant de certaines vitamines (A, B6, B12, C, D, E, et B9) et minéraux (fer, sélénium, magnésium, cuivre, oméga-3) sont plus susceptibles d’être victimes d’infection car ces carences engendrent des défauts de fonctionnement de l’immunité adaptative et de l’immunité innée, sans compter un risque plus élevé d'inflammation chronique, qui nuit à la réponse immunitaire.

Selon les nutriments manquants, on peut observer de multiples dysfonctionnements notamment une altération et/ou une diminution du nombre de cellules immunitaires (lymphocytes, cytokines), un dysfonctionnement des réactions immunitaires (phagocytose, réduction des réponses des anticorps, cicatrisation des plaies).

Par exemple, un apport insuffisant en oméga-3 perturbe la réponse inflammatoire de l’organisme. En effet, les oméga-3 EPA et DHA permettent de résorber l’inflammation lorsqu’elle n’est plus nécessaire, et une carence en cet acide gras essentiel entraîne un retard dans la résorption de l’inflammation.

À lire aussi : COVID-19 : qu’est-ce qu’un orage de cytokines et pourquoi est-ce une question de vie ou de mort pour les malades ? (Abonné)

Il a été démontré qu’une carence en vitamine D augmente le risque d'infection respiratoire, même si les preuves de son intérêt contre le COVID-19 manquent encore. De même, la supplémentation en vitamine C réduit la durée et la gravité du rhume, et peut diminuer le risque d'infection dans certaines populations (sportifs).

Le problème, explique le Dr David Richardson (université de Reading, Royaume-Uni), « c'est que les déficits en micro-nutriments se développent progressivement et il se passe beaucoup de temps avant que les symptômes de déficit apparaissent et soient traités. »

Parmi les populations les plus touchées par les déficits figurent les personnes âgées de plus de 60 ans. Une étude conduite dans sept pays occidentaux sur les apports en 8 oligo-éléments chez les 60 ans et plus a observé une carence en sélénium chez 49 % des femmes et 37 % des hommes vivant à domicile et chez 44 % de femmes et 27 % des hommes en EHPAD. Une carence en zinc a également été observée chez 31 % des femmes et 49 % des hommes vivant chez eux. Les déficits sont également fréquents en fer, iode et cuivre.

Des risques de déficits ont aussi été rapportés chez les végétariens et les végans, en particulier pour ce qui est des acides gras oméga-3, des protéines, du calcium, du zinc, du fer, et des vitamines B12 et D. 

En pratique : que manger pour soutenir son système immunitaire ?

Une attention particulière doit être portée aux populations les plus fragiles, en particulier les plus de 65 ans, les personnes âgées en institution, les personnes immunodéprimées.

Les fruits et légumes

Pour leur richesse en micronutriments et notamment en polyphénols, les fruits et légumes devraient être au centre d’une alimentation soutenant le système immunitaire et la santé en général, explique le Pr Calder. En effet, les polyphénols sont des antioxydants bénéfiques pour la flore intestinale, avec des conséquences positives sur l’immunité et des effets anti-inflammatoires.

Pour profiter au maximum de ces bénéfices, il vaut mieux choisir des fruits et légumes issus de l’agriculture biologique car il y a globalement plus de polyphénols dans les végétaux non traités avec des pesticides, ces antioxydants constituant un moyen de défense de la plante.

Voir : Les fruits et légumes les plus riches en polyphénols

Les prébiotiques

Soutenir son système immunitaire, c'est aussi prendre soin de son microbiote, car 70 % de l'immunité est hébergée dans les intestins et le côlon. Les fibres sont le carburant des bactéries bénéfiques dont notre microbiote est composé. On les trouve dans les fruits et légumes, ainsi que dans les légumineuses, les céréales complètes et semi-complètes, les fruits oléagineux.

L’entretien de la flore intestinale permet de soutenir le système immunitaire, mais aussi d’améliorer tous les paramètres métaboliques qui font l’objet des déséquilibres dans plusieurs troubles comme l'obésité ou le diabète qui sont autant de facteurs pouvant rendre l’infection au coronavirus plus grave.

Pour en savoir plus, lire : Les aliments qui stimulent l’immunité

Les probiotiques

Les bonnes bactéries du microbiote représentent une barrière contre les agents pathogènes. En leur apportant des prébiotiques, on participe à leur prolifération et à leur diversité, mais on peut aussi enrichir directement son microbiote via les aliments fermentés dits probiotiques : fromage, yaourt, légumes lactofermentés, kéfir, kombucha

Les produits d’origine animale

Le Pr Calder préconise aussi la consommation de produits animaux pour un bon apport en fer, en cuivre (huître crue, bœuf) et en vitamine A (huile de foie de morue, foie d'animal nourri en bio, jaune d’œuf, beurre).

Les aliments à éviter

À tous ces précieux conseils, LaNutrition.fr ajoute la limitation de la consommation d’aliments ultra-transformés, connus pour contenir des calories vides, riches en glucides raffinés (connus pour réduire l'efficacité du système immunitaire), en sel, en graisses saturées, et en ACE en tout genre. Ces aliments sont à l’origine des déséquilibres métaboliques rencontrés dans plusieurs maladies de civilisation (obésité, diabète de type 2, hypertension…) qui représentent aujourd’hui les principaux facteurs de risques des formes graves de COVID-19.

Pour éviter les pièges de l’industrie agro-alimentaire qui fait la promotion de la consommation de ces produits voici quelques conseils :

Doit-on prendre des compléments ?

Le Pr Calder n’hésite pas à conseiller des compléments alimentaires pour combler rapidement les déficits avérés ou potentiels en micronutriments, notamment des compléments multivitaminés, des oméga-3 et des suppléments en vitamine B12 pour les personnes qui excluent les produits animaux de leur régime alimentaire. De plus, le professeur recommande aussi une supplémentation en vitamine C et vitamine D. Parmi les personnes à risque de déficit en vitamine D à la saison froide, figurent celles qui vivent dans le nord de la France, en Belgique et au Québec, les personnes obèses et en surpoids, les personnes de couleur.

En plus des supplémentations spécifiques (vitamine D pour tous, vitamine B12 pour les végétariens) on peut s'orienter vers un complément de multivitamines bien équilibré. Le conseil d'un professionnel de santé est recommandé.

Les précautions à prendre avec les compléments alimentaires
En France, l’ANSES met en garde contre la consommation de compléments alimentaires en cette période d’épidémie de coronavirus notamment ceux contenant des plantes ayant des propriétés anti-inflammatoires : le saule, la reine-des-prés, le bouleau, le peuplier, la verge d’or, les polygalas, l’harpagophytum, les échinacées, le curcuma, la griffe du chat (appelée aussi liane du Pérou), les plantes des genres Boswellia et Commiphora (connues pour leurs gommes-oléorésines appelées respectivement « encens » et « myrrhe ».

Pour aller plus loin et avoir toutes les recommandations synthétisées sur une fiche imprimable, lire : Comment bien nourrir son microbiote pour une immunité au top

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